Une étude (presque) sérieuse pour potiers extrêmes et volcanologues rêveurs. Par le Dr. Jean-Magma Lavacier, géo-céramologue diplômé du labo de l’imaginaire.
Imaginez : un atelier perché sur les flancs d’un volcan actif. Au lieu du doux ronron d’un four électrique, le rugissement sourd d’une coulée de lave incandescente. Des potiers en combinaisons ignifugées, armés de longues perches, glissant des bols en terre cuite directement dans les entrailles de la Terre. Ça claque, non ?
Chez FTC Magazine, on s’est posé la question que personne n’a osé formuler à voix haute (et pour de très bonnes raisons) : peut-on, en vrai, cuire de la céramique avec de la lave ?
Spoiler : c’est une idée aussi brillante que suicidaire. Mais explorons-la sérieusement. Enfin, presque.
Quelle température peut atteindre la lave en fusion ?
Commençons par les bases. La cuisson de la céramique, ce n’est pas du réchauffé. Il faut monter dans les tours :
- Terre cuite : ~900°C
- Grès : ~1200°C
- Porcelaine : jusqu’à 1400°C pour les énervés du kaolin
La lave, cette soupe ardente sortie tout droit des entrailles de la terre, peut atteindre entre 700°C et 1200°C, selon sa composition (basalte pour les laves cool, andésite pour celles qui en veulent).
Certaines éruptions sortent même des coulées à plus de 1250°C — jackpot pour notre potier de l’extrême.
Donc oui, sur le papier, ça passe. C’est chaud. C’est très chaud même.
Bon, mais concrètement, on fait comment ? (spoiler : on ne fait pas)
1. Problème n°1 : le contrôle thermique
Le four traditionnel monte lentement en température, puis redescend tout aussi gentiment. La céramique, elle, aime ça. Elle déteste les surprises.
La lave, c’est comme la visite surprise de la belle-mère chez toi : 1100°C instantanément, sans préavis. Résultat ? Votre belle coupe en grès explose comme du pop-corn au contact. Funérailles immédiates.
2. Problème n°2 : l’atmosphère de cuisson
Dans un four, on contrôle l’atmosphère (oxydante ou réductrice), ce qui joue sur les couleurs. Avec de la lave ? Zéro contrôle. Une atmosphère globalement composée de soufre, dioxyde de carbone, et peut-être les larmes de vos espoirs artistiques.
3. Problème n°3 : la contamination
La lave est tout sauf pure. C’est un cocktail explosif de minéraux, métaux, gaz. Le moindre contact peut teinter, ronger, voire digérer votre pot. En prime, ça pourrait donner des textures intéressantes. Ou un tas informe et toxique.
4. Problème n°4 : le choc thermique
Même les céramiques réfractaires (coucou la zircone) ont leurs limites. Les autres ? Elles fondent ou explosent. Bref, ça sent plus le barbecue que la cuisson fine.
A-t-on déjà vu des gens assez fous pour essayer ?

À notre connaissance : non. Pas directement.
Mais des civilisations ont utilisé des pierres volcaniques chauffées pour cuire des objets. Des chercheurs fous ont même testé des interactions entre céramique et cendres volcaniques à haute température (souvent pour l’aéronautique — moins fun, plus utile).
Mais personne n’a encore osé lancer un atelier de poterie sur le cratère du Stromboli. Ce qui est à la fois rassurant et profondément décevant.
Est-ce que c’est une mauvaise idée ?
Absolument. Est-ce qu’on veut essayer ? Carrément.
En conclusion, cuire de la céramique avec de la lave, c’est possible. Enfin, théoriquement. Comme traverser un champ de mines en monocycle ou utiliser un sèche-cheveux sous la douche.
Mais dans le fond… est-ce que l’art ne mérite pas qu’on tente l’impossible ?
Alors oui, vos bols risquent de finir fondus, vaporisés ou fusionnés avec la roche mère. Mais vous aurez flirté avec l’essence même de la Terre. Et ça, c’est peut-être la cuisson ultime.
Quand la poterie dépasse les limites
Corps, matière, chaleur… la céramique teste tout.
→ Cendres humaines : devenir un vase, littéralement.
→ TheFootPottress : quand le corps se réinvente avec la poterie inclusive.
Bonus : le kit du potier volcanique
À emporter pour votre première cuisson en lave :
- Une perche en titane de 5 mètres
- Une combinaison digne d’une mission martienne
- Une assurance vie (plutôt deux)
- Un bon alibi pour expliquer aux secours ce que vous faisiez là
FTC Magazine continuera de rêver à cette cuisson apocalyptique. Et qui sait ? Peut-être qu’un jour, un potier fou osera aller là où aucun bol n’a jamais été cuit…
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